Ambre et Pierre sont les heureux parents de quatre enfants. Jade 18 ans, Kaya 14 ans, Dune 12 ans et Madhi 9 ans. Aujourd’hui, leur vie se partage entre la Loire et le Gers où ils retapent une grande maison dans laquelle ils ont hâte d’emménager. C’est autour d’un café du matin qu’Ambre raconte leur parcours…
Alors qu’Ambre n’était même pas encore née, sa mère a découvert un livre qui allait changer sa vision de l’enfant et de l’éducation : « Libres enfants de Summerhill » d’ A.S. Neill. (Editions La Découverte «). Dans cet ouvrage, l’auteur Alexander Sutherland Neill, psychanalyste de formation raconte le fonctionnement de l’école Summerhill, une école autogérée qu’il a fondée en 1921. Dans son établissement, les enfants jouissent d’une liberté totale. Le jeu est la principale activité et les élèves ne sont contraints à aucune assiduité en classe. Seule l’envie d’apprendre compte.
Pour Alexander Neill, c’est le plus sûr chemin vers l’autonomie et le bonheur d’être.
Ce livre est sorti en 1970, en pleine période contestataire : mai 68 en France, Woodstock et les hippies aux USA. L’ouvrage est un succès, il devient un phénomène de société et une référence pour ceux qui souhaitaient élever leurs enfants autrement.
Pour la maman d’Ambre, ce livre fut à l’origine d’une prise de conscience profonde. Elle y a découvert toute la liberté de grandir sereinement qu’elle voulait offrir à sa fille. « Si à l’époque ma mère avait su que l’instruction en famille était autorisée en France, c’est évident que c’est l’option qu’elle aurait choisie. »
Mais dans les années 70, Internet n’existait pas, l’information selon laquelle l’école n’est pas obligatoire était encore confidentielle.
Alors la maman d’Ambre fait le choix de garder à ses côtés sa fille aussi longtemps que la loi le lui permettait. Elle ne l’inscrit qu’en dernière année de maternelle. En parallèle, elle commence à suivre des formations pour devenir assistante en classe. Le meilleur moyen pour elle de rester au plus près de sa fille malgré la scolarisation. Au fil des rentrées scolaires, la petite Ambre s’avère être une excellente élève. Elle est à l’aise avec les autres enfants et bien souvent première de la classe.
Et puis devenue adolescente, Ambre a découvert le plaisir des fêtes entre copains. L’école ne lui semblait plus si nécessaire et en Première, elle a décidé d’arrêter le lycée. Très curieuse, Ambre a toujours lu énormément. Une passion pour la lecture qui a commencé très tôt puisqu’à 9 ans, elle dévorait déjà L’Étranger de Camus. Dans cette frénésie de lecture et de curiosité, elle fait ainsi connaissance avec les écrits de Maria Montessori et de Célestin Freinet. « J’ai été très touchée par leur vision d’une éducation en autonomie. Du coup, quand j’ai accouché de Jade ma première fille, je savais déjà que je l’inscrirais dans une école Montessori »
Au moment de passe le cap de l’inscription , Ambre et son mari Pierre sont arrêtés par le coup de l’inscription qui était bien trop élevé pour le jeune ménagr. Mais il en fallait plus pour décourager la jeune maman qui se met alors en quête sur internet de solutions pour créer elle-même son matériel pédagogique. Et surprise, elle découvre que non seulement certaines mamans fabriquent elles-mêmes leur matériel mais surtout qu’elles dispensent l’enseignement directement à la maison à leurs enfants. Ambre est profondément séduite par le principe mais elle découvre vite que l’idée ne fait pas l’unanimité
Ainsi sa meilleure amie d’Ambre qui, travaille alors au sein de l’Education Nationale tente de la dissuader « Elle a tout fait pour me dissuader de faire l’école à ma fille. Elle défendait l’école laïque, gratuite et accessible à tous. Pour elle, ne pas scolariser un enfant, c’était le sortir d’un système qui lui permettrait un jour de devenir un citoyen éclairé. Selon elle, j’allais ôter toute chance à ma fille d’apprendre le « vivre ensemble ». C’était évident, j’allais la priver d’une socialisation fondamentale. A l’écouter, j’ai vraiment eu l’impression qu’en sortant Jade du système scolaire, j’allais gâcher sa vie. Et à l’époque, je dois avouer que ses arguments m’ont touchée. »
Jade entre donc en maternelle dans l’école de son village dès la petite section. Au cours de sa deuxième grossesse Ambre découvre à son tour un livre qui va bousculer ce qu’elle croyait ancré : « Elever son enfant autrement ».
« Ce livre s’intéressait à la parentalité alternative. Ce que l’on appelle aujourd’hui la parentalité bienveillante. Il y était question d’allaitement, de couches lavables, du cododo… Tant de sujets qui m’ont frappée en plein cœur et qui m’ont permis de réaliser que c’était exactement ce que je voulais pour mon bébé à naitre.
Et puis bien sûr, dans ce livre, il y avait aussi un chapitre sur l’école à la maison qui m’a confirmé que légalement c’était possible et surtout réalisable. J’ai compris à ce moment-là que non seulement j’en avais vraiment envie mais en plus j’étais vraiment prête… et j’ai donc décidé de foncer… »
A cette période, Jade est en moyenne section au sein d’une classe multi-niveaux qui va de la Très petite Section au CP. Elle aime l’école mais se montre très frustrée car elle veut apprendre à lire. Cependant la maitresse ne répond pas à ses demandes incessantes. « Je suis allée la rencontre de l’enseignante pour lui demander si elle aurait par chance des fiches, des aides qui permettrait à Jade de progresser en lecture. Elle m’a alors répondu qu’il n’y avait aucune urgence d’apprendre à lire et que l’on verrait cela plus tard. Je voyais Jade tellement en demande qu’à ce moment-là ce fut un déclic pour la déscolariser. J’ai donc décidé de la retirer de l’école en cours de moyenne section. Avec mon aide, elle a appris à lire en trois mois, elle avait 5 ans. »
La première année d’école à la maison s’est bien déroulée. Même si aujourd’hui, avec le recul Ambre l’analyse avec un regard plus nuancé. « A l’époque, je dois reconnaitre que j’avais énormément d’attentes. J’avais installé toute une salle Montessori et chaque fois qu’elle ne ressentait pas l’envie de travailler, je me sentais très frustrée. Avec le recul, je me rends compte que j’étais encore trop contrôlante et cela engendrait du coup pas mal de frictions sur les apprentissages. Mais Jade était très curieuse et qu’elle apprenait très vite. »
Peu après la naissance de Kaya, Ambre attend à nouveau un enfant Au quatrième mois de grossesse, elle connait des complications. Le médecin lui interdit de porter ses enfants et lui recommande de se reposer le plus possible. Pour Ambre, l’école semble alors la seule solution . Kaya est inscrite en Toute petite section et Jade en CP. « Je n’oublierai jamais qu’à la fin de l’année, sur le bulletin de Jade la maitresse avait écrit « Elève très vive, très intelligente se débrouille très bien en lecture et orthographe malgré une déscolarisation d’un an. » J’ai trouvé cela d’autant plus rude que Jade était arrivée en CP en sachant déjà lire… ».
A la fin de cette année-là, la famille déménage dans un autre village et soudain l’école semble une belle opportunité de rencontrer des amis tant pour les parents que pour les enfants. Mais très vite pour Ambre, l’année de CE1 de Jade s’avère particulièrement décevante. « Si jusque-là, elle avait toujours eu des institutrices très à l’écoute, avec de belles initiatives, offrant toutes sortes de chouettes activités, cette année-là, cela a été une autre histoire. Là, il n’était pas question de faire autre chose que de l’école pure et dure…
Aucun spectacle, zéro projet pédagogique. Que du travail. Alors comme je faisais partie de l’association des parents d’élèves, j’en ai profité… J’ai proposé de faire un potager, d’organiser des sorties, d’aller voir des films… Mais à chaque fois, je m’entendais dire que c’était compliqué…Cela n’était jamais possible… »
Ambre prend alors rendez-vous avec le directeur. S’en suivent une heure trente de discussion intense. Non le directeur ne peut évidemment pas l’empêcher de déscolariser ses enfants mais oui il pense que c’est une erreur. Non il ne peut absolument pas proposer des activités plus ludiques au sein de son école. Devant l’étonnement d’Ambre, la sentence est alors sans appel. « Le directeur m’a dit cette phrase qui résonne encore dans ma tête «Tout ce qu’il y a à côté je n’ai pas le temps. Je suis là pour transmettre quitte à ce que ça saigne un peu. » »
Pour Ambre, la rupture est consommée… Un nouveau chapitre commence.
«J’ai parlé à Jade de l’Ecole à la maison comme d’une aventure en lui disant que si au bout d’un an ou même avant, cela ne lui convenait pas, elle pourrait retourner à l’école. En fait, elle n’y est plus jamais retournée et aucun de mes enfants n’y est jamais allé non plus.
Au début, je dois reconnaître que je n’étais pas totalement sûre de moi. J’ai donc décidé de m’appuyer sur des cours par correspondance pour l’accompagner. Cela venait de Belgique et cela s’appelait Enseignement à distance…Mais au final au bout de trois mois Jade a trouvé cela ennuyeux. Je continuais en parallèle la pédagogie Montessori. Et puis, nous nous sommes intéressées à la pédagogie Steiner. L’idée est, entre autres d’illustrer tout ce que l’on apprend pour bien entériner le savoir et il y a en parallèle tout un travail à l’oral. Cette méthode m’a passionnée pendant une année et puis après, je dois avouer, que j’étais un peu agacée par toutes les fêtes païennes qui y sont rattachées. »
Peu à peu, Ambre explore les différentes méthodes possibles. Comme une cheffe en cuisine, elle suit son inspiration pour trouver la bonne recette. Elle utilise certains éléments de Montessori, garde certains de Steiner et choisit d’autres principes de Reggio ( pédagogie italienne peu connue en France basée sur l’inventivité et la créativité des enfants et les poussant dans leur exploration autonome NDLR).. En parallèle, elle y rajoute également aussi des apprentissages formels issus des cours à distance.
« J’organisais souvent des ateliers. Ainsi, le matin, les enfants se levaient et découvraient une thématique. Si on travaillait sur les dinosaures, dans la pièce à vivre il y avait mille choses à explorer : des cartes en trois parties issues de la pédagogie Montessori, toutes sortes de livres documentaires, des maquettes à monter, des dinosaures en pâtes à sel que j’avais cachés dans des bacs de sable qu’ils découvraient à l’aide d’un pinceau comme des archéologues. Je créais toutes sortes de jeux.
J’avais également fabriqué une table lumineuse issue de la pédagogie Reggio sur laquelle on glisse des radios, des feuilles etc.. Je m’amusais à leur proposer ces ateliers « découvertes » tous les deux ou trois jours. Cela pouvait être sur un pays, sur les pyramides et leur construction, sur les plantes. »
Ces apprentissages sont complétés par de nombreuses sorties pédagogiques. Et puis les années passant, Ambre a commencé à proposer aux enfants des apprentissages plus formels avec des cahiers d’exercices mais sans jamais perdre de vue les applications plus concrètes de l’instruction.
« Par exemple si on travaillait sur le Moyen Age, on ne se contentait pas du cahier… Je sortais alors tous les livres de ma bibliothèque en lien avec le sujet, que cela soit pour enfant ou non. Nous allions visiter des châteaux, des parcs à thèmes… C’était important de donner vie à nos découvertes. Et j’ai remarqué que plus le temps avançait et plus ils se montraient autonomes dans leurs apprentissages.
Alors nous avons naturellement glissé vers le unschooling (Le unschooling consiste à favoriser l’apprentissage autonome en fonction des envies et des centres d’intérêt de l’enfant en dehors de tout programme scolaire. L’adulte n’imposant aucune méthode d’apprentissage formelle NDLR) et les apprentissages informels et autogérés. Il suffisait de parler d’une thématique pour voir si cela les intéressait ou pas. Ensuite, je cherchais des supports que je leur proposais mais je ne les obligeais plus. Je ne les forçais plus à suivre un programme.
A partir du moment où ils maitrisaient les quatre opérations et la lecture… le reste était en fonction de leurs goûts, de leurs envies et leurs besoins. »
En avançant sur les divers chemins de la pédagogie, Ambre s’est naturellement rapprochée de la philosophie des Libres enfants de Summerhill visant à faire confiance aux envies et aux besoins de l’enfant.
« A force de m’intéresser à la pédagogie sous toutes ses formes, je me suis finalement rendue compte qu’une fois que l’on enlève l’essentiel à savoir compter, lire et écrire, à bien regarder le programme scolaire, ce n’est ni plus ni moins que de la culture générale.
La géographie de notre pays, la pollinisation des fleurs, ce ne sont pas forcément des apprentissages nécessaires. Nous pouvons être passionnés par une période d’Histoire et pas une autre… C’est assez propre à chacun finalement…
En me documentant sur le unschooling et les apprentissages auto-gérés, j’ai réalisé qu’il me semblait plus important d’apprendre ce qui nous plaisait et ce qui nous faisait vibrer que d’ingurgiter toutes sortes d’apprentissages simplement parce que cela fait partie d’un programme. »
Soucieuse de les accompagner en âme et conscience, Ambre s’est énormément documentée sur le fonctionnement du cerveau et sur les méthodes d’apprentissage en général. Elle a ainsi acquis des connaissances solides sur le sujet tout en nourrissant sa réflexion en échangeant avec d’autres mamans en IEF.
« Les neurosciences nous ont démontré que l’on apprend plus facilement et avec plus de plaisir ce que l’on a envie d’apprendre avec une volonté intrinsèque
Si on nous force, bien sûr nous pourrons apprendre par cœur pour un examen. Nous avons tous appris des poésies, la guerre de 39-45, des cours de Biologie mais finalement 20 ans après, on se rend compte que l’on a tout oublié ou que cela ne nous intéresse pas car nous n’en avons pas l’utilité…
Si l’on ne connait pas les égalités remarquables en mathématiques, il sera tout à fait possible de vivre toute une existence sans que cela soit un problème. Mais si d’un coup, on en a besoin professionnellement ou pour passer un diplôme, notre cerveau sera alors assez mature et notre volonté assez forte pour l’apprendre aisément et rapidement.
Et c’est prouvé, que lorsqu’on a besoin d’une connaissance, on apprend beaucoup plus vite…L’humain ne peut pas ne pas apprendre. »
Mais déscolariser ses enfants n’est pas pour autant une démarche facile et légère. Car il faut s’occuper d’eux tout en continuant à gérer l’intendance du quotidien. Une charge qui bien souvent incombe aux femmes car quitte à se passer d’un salaire autant que cela soit celui qui est le moins élevé. Pour ces mères » en charge », une allocation femme au foyer serait bienvenue.
Paradoxalement, les familles en IEF n’ont pas non plus droit à l’allocation rentrée scolaire alors que par essence ils sont amenés à dépenser plus qu’une famille dont les enfants vont à l’école. Les livres, le matériel, les sorties, le budget est conséquent et il faut donc accepter de faire des sacrifices sur d’autres postes de dépense.
« Heureusement, les côtés positifs aujourd’hui pour l’Instruction en famille, c’est qu’il est maintenant très facile de trouver tout ce dont on a besoin en termes de supports pédagogiques sur internet. Beaucoup de professeurs mettent toutes sortes de supports gratuits en ligne. A cela s’ajoutent tous les parents qui ont des blogs et qui mettent des idées à disposition…
A partir du moment où l’on a internet et une imprimante, on peut tout trouver… Je dirais même que l’imprimante et la plastifieuse peuvent être les meilleures amies d’une maman qui fait l’école à la maison. »
Le mari d’Ambre restaure des caravanes anciennes. Il a ainsi aménagé un bus qui permet depuis des années à toute la famille de voyager ensemble. Un moyen peu onéreux de partir à la rencontre des copains un peu partout en France.
L’école à la maison c’est une liberté immense mais c’est aussiaccepter d’être avec ses enfants tous les jours de la semaine, 24 heures sur 24. Cela impose de bien se connaitre pour savoir respecter l’espace de chacun.
« Au fil des années, ma parentalité a évolué. A partir de la naissance de mon 2ème enfant, je me suis dirigée vers l’éducation bienveillante, et je me suis auto-formée à cette approche éducative. Mon comportement envers mes enfants a évolué et naturellement les problèmes du quotidien ont disparu.
J’ai arrêté d’avoir des attentes démesurées. J’ai appris le lâcher-prise et je me suis rendue compte que si le déjeuner n’était pas prêt à midi et si le ménage n’était pas fait à 13 heures et bien finalement, ce n’était pas si grave…
Je me suis rendue compte que je m’étais mise une pression invraisemblable qui engendrait du stress dans la maison… Et inévitablement, je m’énervais contre les enfants… Nous avons dû apprendre à vivre ensemble et moi j’ai dû apprendre à me détendre sur mes objectifs… »
Au fil des années, à force de regarder vivre ses enfants, Ambre a naturellement appris à les considérer comme des personnes à part entière. Exactement au même titre que les adultes.
« Personnellement, je suis dans une démarche de respect de l’enfant et de non-âgisme. L’âgisme c’est le fait de traiter quelqu’un différemment parce qu’il a un certain âge. Comme les personnes âgées qui ont toute leur tête mais à qui on parle comme à des enfants. Dans la même lignée, il y a l’adultisme, à savoir, imposer des règles, des idées, des principes aux enfants sous prétexte que l’on saurait mieux qu’eux parce que l’on est des adultes. Bien sûr nous avons plus d’expérience qu’eux mais cela ne leur enlève ni leur autonomie, ni leur liberté de penser et encore moins leurs sensations. Typiquement, il faut arrêter d’imposer à un enfant de porter un pull parce qu’on trouve qu’il fait froid… Surtout quand on est assis sur un banc du parc sans bouger alors que lui court partout…Il sait s’il en a besoin ou non… »
Aujourd’hui, Ambre se définit comme une « slasheuse », à savoir qu’elle s’épanouit grâce à ses vies multiples. Son activité principale consiste à animer des ateliers et faire des conférences sur la parentalité et la communication pour aider les parents à éduquer et accompagner leurs enfants de manière bienveillante.
« Je leur apprend à élever leurs enfants sans punition et sans cri, sans fessée, sans violence éducative ordinaire. J’ai la preuve que par l’éducation donnée à mes enfants il est tout à fait possible de les élever sans leur crier dessus, sans les punir, sans taper et sans en faire des enfants tyrans…Pour beaucoup l’éducation bienveillante est synonyme de laxisme, d’enfant-roi voire de tyran… Alors que l’éducation bienveillante a pour vocation de permettre aux enfants d’être libres et autonomes mais aussi tout simplement respectueux des autres…
On nous prédisait des enfants-rois, des asociaux, des incultes, mais aujourd’hui nous avons des enfants épanouis, heureux, curieux et bienveillants et nous en sommes fiers et heureux. »
Si Ambre est naturellement dans une démarche d’écoute des envies de ses enfants pour elle, il est important de ne jamais les faire passer avant ses besoins à elle. Les besoins de ses enfants sont tout simplement au même niveau que les siens… Une philosophie, un état d’esprit qu’elle partage avec Pierre son mari.
« Depuis le début je dis « je » mais tout cela est en accord avec mon conjoint. C’est un élan coopératif. Nous avons choisi ensemble l’éducation que nous donnons à nos enfants. Clairement il a été plus important pour nous que nos enfants fassent des activités qu’ils aiment quitte à ne pas être très riches. Jamais nous avons eu l’idée de leur dire passe ton Bac d’abord et après on verra. Nous leur avons toujours dit de faire ce qui les intéressait et s’ils avaient envie de passer leur Bac qu’ils le fassent…Je crois profondément que les gens passionnés trouvent autant de travail que les gens diplômés. »
Comme tous les unschoolers, le Bac n’est pas une fin en soi mais il est considéré comme un outil éventuel pour accéder à la vie que l’on veut mener.
« J’ai lu Bourdieu et je sais ce que c’est que le déterminisme social. Je ne dis pas à mes enfants que si demain ils veulent être avocat, cela sera forcément facile. C’est toujours plus facile d’être médecin quand on vient d’une famille de médecins ou avocat quand on vient d’une famille d’avocats mais je pars du principe qu’en s’intéressant au monde, en étant passionné on trouvera sa place, une place où l’on se sentira bien. Sachant que rien n’est définitif. »
Aujourd’hui les enfants d’Ambre et de Pierre ont chacun leurs envies et leurs passions. Et peu à peu, leur futur se dessine. Jade a appris en autodidacte à utiliser Photoshop. Elle s’intéresse à la retouche numérique, elle fait ce que l’on appelle aujourd’hui de la photo-manipulation. Elle écrit des nouvelles et publie régulièrement sur Wattpad, une plateforme sociale d’histoires narratives. Son rêve serait d’être graphiste et de travailler dans une maison d’éditions pour faire des couvertures de livres.
Kaya se cherche encore mais elle aime au quotidien concevoir des cosplay, créer des personnages à partir de maquillage et de costumes. C’est une jeune fille tournée vers le domaine artistique : la danse et le chant. Elle aime également écrire.
Dune a, pour sa part, une vraie passion pour le montage. Elle réalise des vidéos à partir de personnage qu’elle crée elle-même. Quant à lui Madhi, le dernier de la fratrie, aimerait, devenir gamer professionnel.
Attentive, naturellement à l’écoute, Ambre reste assez lucide sur leur niveau d’apprentissage.
« Je pense que nos enfants savent énormément de choses que bien des enfants scolarisés de leur âge ne savent pas.
Je pense, également, qu’il y a énormément de choses qu’ils ne savent pas et que des enfants scolarisés connaissent.
Quand on choisit le unschooling, il y a forcément un certain lâcher-prise à avoir.
Par exemple, Kaya qui a 14 ans devrait passer son Brevet cette année. Si je l inscrivais demain, elle ne serait pas capable de le passer parce qu’elle n’a pas étudié certaines périodes d’Histoire ou certaines problématiques de Maths.
Elle ne sait pas non plus faire une dissertation mais par contre elle est capable d’écrire un roman.
Si elle écrit français, si elle parle français correctement et qu’elle sait monter un récit, est-ce qu’il y a véritablement besoin de savoir rédiger une dissertation ?
Sachant également qu’elle a un esprit critique et qu’elle sait argumenter un sujet qui lui tient à cœur, cela me semble être de véritables atouts. Bien sûr, je suis toujours dans l’inquiétude par rapport à leur évolution.
Peut-être, même un peu plus qu’un parent qui met ses enfants à l’école, mais avec la crise sanitaire, avec cette année 2020, avec l’évolution de la société, qui ne s’inquièterait pas ? »

Quel bonheur cette lecture et comme vous avez raison !!!
Bravo !
Sylvie
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